Oui cette semaine on pleure, de bonheur, de tristesse, de douleur, de ce qu’on veut, mais en tout cas on le fait si on en a besoin et on se demande si on se l’autorise ou si on ne le fait que lorsque le verre déborde. Aujourd’hui on ose aller y regarder, juste pour soi, juste pour se dire que c’est sûrement bien plus normal qu’on pense et qu’on a autant le droit de rire que de pleurer, voire de faire les deux.
Parmi les émotions qu’on laisse parfois difficilement sortir ou qu’on préfère cacher, pleurer est sûrement sur le podium. Qu’est-ce qui peut à ce point nous paralyser, nous retenir, ou nous faire préférer le silence à l’expression ?
En premier lieu se pose la question de savoir comment nous vivons nos émotions ? Spontanées, partagées, extériorisées… Ou enfouies, cachées, gênantes… Chacun(e) y va de son cocktail personnel pour trouver comment laisser exister une émotion sans se sentir menacé(e).
Car peut-être que c’est ici que se joue le point central de l’expression de cette émotion, de ce ressenti: Verbaliser quelque chose de personnel à un(e) autre, avec le risque qu’il(elle) n’en tienne pas compte, le dénigre, le refuse, le moque… Et concernant cette manifestation si visible de nos émotions, les pleurs revêtent souvent le manteau de la faiblesse, de la peur, du manque de force intérieure.
En partant de la métaphore du chêne et du roseau, il serait sûrement plus simple de valoriser l’homme ou la femme qui pleure, ou ne serait-ce que l’accueillir. Car lorsqu’on pleure, on s’octroie le droit de plier, de courber, d’accueillir le vent qui se dresse face à nous, sans devoir lutter de toutes nos forces contre celui-ci. Nous sommes tous faits d’un bois différent, mais à l’inverse des arbres, nous pouvons évoluer, et nous autoriser à ne pas être qu’un chêne, ni qu’un roseau d’ailleurs.
Nous avons les moyens d’être tantôt un chêne, tantôt un roseau et tantôt aussi n’importe quel autre arbre si cette forme favorise notre bien-être.
Pleurer une fois ne signifie pas pleurer toujours.
Commencer à pleurer ne signifie pas ne plus jamais s’arrêter.
Pleurer souvent signifie peut-être que nous ne nous laissons pas le droit de pleurer « entièrement »
On essaie souvent aussi lorsqu’on voit quelqu’un pleurer de le consoler, le rassurer, lui dire que ça va aller, mais parfois l’important est juste d’être là, d’accepter de « mouiller le maillot » comme en sport, d’éponger les larmes avec un mouchoir, un pull… Tendre l’épaule, écouter, et laisser ce qui doit sortir sortir, plutôt qu’essayer d’arrêter le flux, c’est parfois la solution. Ne rien faire et être là, c’est aussi agir.
Mais tout comme un fou rire touche à son terme et a une origine, une pluie de larmes trouvera aussi sa fin et un sens. Mais lorsqu’on se retient beaucoup, lorsqu’on ravale ses larmes, la coupe peut finir par être pleine et les épisodes de pleurs, les envies ou les raisons de pleurer peuvent alors devenir logiquement plus importants et fréquents que lorsqu’on laisse nos larmes s’exprimer au fur et à mesure.
Nous sommes bien d’accord : toute situation n’est peut-être pas propice à pleurer ( même si ce sujet aussi se discute). Mais prendre conscience que les larmes retenues à un moment avaient une raison de vouloir sortir peut éviter à une douleur, un événement de venir s’ancrer trop profondément. Ce qui est parlé, partagé, pleuré, sorti de soi est souvent une chose qu’on porte plus facilement et qu’il n’est plus forcément nécessaire de supporter, de subir à moyen ou long terme. Et puis s’autoriser à pleurer, c’est parfois aussi autoriser l’autre à avoir une place différente, lui permettre d’être là en soutien, de renforcer la confiance, et d’être épaulé ou juste écouté.
Et vous, sur quelle épaule vous autorisez-vous à pleurer en toute confiance ?